Notre vie dans l'Art 5/5
Pièce de théâtre de Richard Nelson
Traduction d'Ariane Mnouchkine
Mise en scène de Richard Nelson
Avec les comédiens du Théâtre du Soleil
Arman Saribekyan, Maurice Durozier, Hélène Cinque, Duccio Bellugi-Vannuccini, Nirupama Nityanandan, Georges Bigot, Tomaz Nogueira, Clémence Fougea, Judit Jancsò, Augustin Letelier, Shaghayegh Beheshti
Assistanat à la mise en scène et interprétariat : Ariane Bégoin et Alexandre Zloto
Lumières : Virginie Le Coënt, Lilia Meynard
Son : Thérèse Spirli
Costumes : Marie-Hélène Bouvet, Nathalie Thomas, Annie Tran
Ensemblier : Sébastien Brottet-Michel
Une production Théâtre du Soleil-Coproduction Festival d'Automne
Impressionnant ! Fabuleux ! Exceptionnel !
Les qualificatifs manquent pour décrire ce spectacle.
La traduction d'Ariane Mnouchkine est magnifique à tous égards. Le texte est admirablement construit et le spectateur est de plus en plus captivé par la discussion à bâtons rompus de la troupe de Constantin Stanislavski venue se produire à Chicago en 1923.
En ce dimanche, les comédiens célébrent le 25ème anniversaire du Théâtre d'Art de Moscou autour de repas, d'un verre. Si on a un peu de mal au début à entrer dans l'univers singulier de ces artistes, l'intérêt ne cesse de croître à mesure qu'on découvre les personnalités des uns et des autres et l'envers du décor...
L'art demande énormément de sacrifices, c'est un sacerdoce, mais il apporte tellement de satisfactions que le jeu en vaut la chandelle semble suggérer Richard Nelson.
On ne peut que s'incliner devant la mise en scène de Richard Nelson, l'incarnation hors pair de chacun des onze comédiens sur scène. On observe les réactions de chacun à ce que dit l'autre. Un regard, un geste, en disent beaucoup plus que de longs discours.
J'ai été particulièrement admiratif de la performance d'Hélène Cinque, qui interprète la veuve de Tchekhov avec grâce et d'infinies nuances.
Le rôle de l'art dans la vie de la troupe est abordé mais aussi son importance dans la vie des spectateurs. La réflexion finale est émouvante et montre à quel point l'art est indispensable à l'existence.
Il y a néanmoins beaucoup d'humour tout au long de la représentation, ce qui ne se fait pas au détriment des réflexions philosophiques, au contraire. L'analyse de la quête de liberté, de la mentalité des différents groupes sociaux russes ou américains est très enrichissante, tout comme les relations difficiles avec le pouvoir en place quand on est artiste.
Comme le fait remarquer Constantin Stanislavski, formidable Maurice Durozier, les êtres humains sont les seuls à s'interroger sur leur place dans le monde.
On éprouve un immense sentiment de gratitude à la fin de la représentation, tant le spectacle donné est d'un niveau extraordinaire. On se dit que la représentation aurait lieu quoi qu'il arrive, avec ou sans public, tant on croit aux personnages, à leur implication.
C'est le plus beau spectacle qu'il m'ait été donné de voir.
Merci infiniment à tous ceux qui ont contribué à cette merveilleuse création, d'une exigence peu commune.
Publié le 10 janvier 2024
À la Cartoucherie, Théâtre du Soleil jusqu'au 3 mars 2024