À rendre à M. Morgenstern en cas de demande 5/5 !!!!♡♡♡♡♡♡♡
De Frédéric Moulin.
Mise en scène de Frédéric Moulin.
Dramaturgie : Caroline Garnier.
Lumières : François Robert.
Images : Anna Fuga et Lucas Moulin.
Avec Sabine Moindrot et Frédéric Moulin.
Une formidable interprétation et une mise en scène sobre très inspirée.
Frédéric Moulin a écrit un texte très subtil en s'appuyant sur des documents authentiques. Ce texte pose beaucoup de questions et apporte peu de réponses, et c'est ce qui fait sa force.
La puissance évocatrice de ce texte mis en scène avec brio par Frédéric Moulin donne beaucoup à réfléchir. Les images d'Anna Fuga et Lucas Moulin contribuent à donner du relief à cette pièce. On ressent beaucoup d'émotions, le récit et le discours sont très poignants tant les interprètes sont justes et habités. C'est une douleur physique qui m'a saisie, sourde vers la fin de la pièce.
On est impliqué dans cette quête, on suit les tribulations du personnage interprété avec une grande sensibilité par Sabine Moindrot. Elle est exceptionnelle, elle a une très belle voix et une très belle présence et elle a un jeu tout en nuances. Quant à Frédéric Moulin, son incarnation de tous les autres personnages force l'admiration. J'ai particulièrement apprécié le dernier personnage, j'ai ressenti des frissons tant Frédéric Moulin est juste et naturel, tant il a de talents multiples et tant l'interaction avec sa partenaire fonctionne bien.
L'un des thèmes centraux est la relation entre mémoire et Histoire. Frédéric Moulin, par son obstination et son art, nous fait partager son histoire et celle de M. Morgenstern, soulevant les obstacles inhérents à la reconstitution d'une vérité historique. La mémoire à laquelle on ne peut pas toujours se fier. La vérité qui semble se dérober sans cesse comme le Lapin Blanc de Lewis Carroll, référence assumée de l'auteur, dont il cite plusieurs répliques très légèrement adaptées et qui disent la difficulté de résider dans un pays où l'indifférence est reine, et où les interrogations s'accumulent comme au Pays des Merveilles en somme, où l'on ne fait pas autre chose que s'interroger ( to wonder en anglais).
Cette pièce, qui a une portée universelle, est salutaire car elle incite à se soucier de son prochain et donne un visage à l'horreur vécue par les Juifs, celui de Léopold Morgenstern, celui des membres de sa famille.
Les questions laissées en suspens ouvrent de larges perspectives et on est tellement pris par les enjeux de la pièce qu'on est presque déçu quand elle s'arrête.
L'intensité du spectacle est si grande que j'ai eu du mal à sortir de cette évocation magistrale, dix minutes après j'étais toujours plongé dans l'univers de l'auteur, ce qui ne m'était arrivé que deux fois ces 8 derniers mois.
Une représentation que je souhaite à chacun de découvrir. Une pièce particulièrement adaptée aux scolaires tant elle est dense et aboutie.
Je m'étonne qu'une pièce d'une si grande exigence ne soit pas appréciée par un public plus large.
Publié le 19 janvier 2022.
Au studio Hébertot jusqu'au 31 janvier.